Mes conseils pour la pêche en rivière sauvage

Quelle est la meilleure motivation pour pratiquer la pêche en rivière sauvage ? Un fabuleux cadre naturel, une pression de pêche quasi inexistante, et la certitude de vivre une véritable aventure sportive. Mais pratiquer la pêche en rivière sauvage présente également de réels dangers objectifs. Risque de crue, blessure dans un lieu difficile d’accès, chute de pierres… Petite revue des points à anticiper pour le pêcheur, tant dans l’attitude que dans le matériel à emporter.

Nous avons tous rêvé de la grosse « mémère » planquée dans l’immense vasque d’une cascade inaccessible, n’ayant jamais connu l’ombre d’un hameçon ou d’un pêcheur. Ces truites d’exception sont rares, mais elles existent bel et bien, même si les atteindre se mérite. Dans les Alpes françaises (pour me limiter à ce que je connais le mieux), certains lieux demeurent très difficile d’accès. C’est le cas, notamment des zones de gorges, présents sur la plupart des massifs. Dans les Préalpes et massifs calcaires (Vercors, Chartreuse, Bauges, Aravis, Verdon…), la pêche en rivière sauvage est un pléonasme. On ne compte plus les secteurs de gorges, accessibles parfois uniquement avec un équipement spécialisé : corde, harnais… Mais sans tomber dans l’extrême, de nombreuses rivières présentent un profil sauvage, avec des encaissements et des cascades. Autant de lieux magiques, où l’on pourra tenter de débusquer de magnifiques truites sauvages.

Pêche en rivière sauvage : anticiper sa sortie

On ne le rappelera jamais assez. La pêche en rivière sauvage nécessite une préparation minutieuse et une très bonne connaissance des lieux.

Reconnaître la rivière

C’est bien souvent suite à une première reconnaissance d’une rivière que l’on localise les lieux les plus intéressants à pêcher. « Entendre parler de » ne suffit hélas pas à se lancer dans l’aventure en toute sécurité. Il conviendra, au préalable, d’avoir consulté une carte sérieuse des lieux. En termes de carte sérieuse, la seule carte réellement pertinente sera la carte IGN TOP 25, en version papier, ou en version numérique sur le site Geoportail (fond de carte « Carte IGN classique »). La lecture des courbes de niveaux vous donnera une première approche des pentes et des dénivelés. Mais aussi des sentiers et autres « réchappe » envisageables en cas de retour prématuré. Sur les torrents pratiqués par les canyonistes, le site Descente-Canyon pourra également être précieux. Même si les techniques de descendre et l’équipement du canyoniste lui donne certaines aptitudes que possèdent que rarement les pêcheurs.

Pour la pêche ne rivière sauvage, une excellente connaissance de la rivière s'impose

Autre aspect à prendre en compte : l’hydrologie. Les débits des rivières et des torrents peuvent être très variables d’une rivière à l’autre, mais aussi en fonction des saisons (étiage ou fonte), de la météo (orages) ou des éventuels lâchers d’eau des ouvrages hydroélectriques situés en amont. Le site de référence Vigicrues peut être intéressant mais son réseau se limite aux rivières les plus importantes. Il peut toutefois trahir des variations de débit très instructive. Un débit bas le matin, ayant tendance à s’élever l’après-midi, définira une rivière sensible à la fonte des neiges. Des débits hachés signalent des lâchers d’eau d’ouvrages hydroélectriques.  Prudence !

Geoportail (fond Cartes topographiques IGN)
Portail Vigicrues
Débits participatifs, sur le site Descente-Canyon.

Géoportail, Vigicrues, Descente-Canyon… D’excellentes ressources pour un bon aperçu de l’hydrologie de vos rivières.

Anticiper la météo

Autre point crucial : la météo, et principalement les risques d’orage, susceptible de provoquer une montée des eaux massive et rapide. Si, en rivière traditionnelle, il suffit de reculer de quelques pas pour se mettre en sécurité, les conditions sont plus problématiques en rivière encaissée. Une montée des eaux pourra en quelques minutes vous bloquer en amont comme en aval, en raison d’obstacles devenus infranchissables. La traversée de la rivière elle-même étant parfois impossible lorsque le niveau et le débit de la rivières sont trop important. Il vous faudra donc anticiper largement les conditions météos en veillant à :

  • partir uniquement lorsque les conditions d’étiage rendent la remontée de la rivière possible
  • partir lorsque les risques d’orage sont nuls sur les 24 heures à venir. La météo étant souvent imprévisible en montagne, abstenez-vous simplement en cas de doute.

Prévenir ses proches et ne pas partir seul

Autant que faire se peut, évitez de partir seul lorsque les conditions de sécurité sont « limites ». Un banal accident peut en effet avoir des conséquences nettement plus dramatiques qu’en rivière de plaine. Dans les rivières encaissées (cascades, gorges), l’accès aux secours, pour les recherches comme pour le sauvetage, sera forcément rendu très compliqué. Le risque de rester blessé plusieurs heures devient de ce fait nettement plus important. Dans tous les cas, partir à deux est très conseillé. Et a minima, prévenir une personne de votre entourage est un impératif avant le départ.

Pêche en rivière sauvage : évoluer sur le terrain

Le temps est beau, les conditions hydrologiques parfaites… Vous voilà parti pour une partie de pêche en rivière sauvage. C’est à partir de ce moment que chacune de vos décisions peut avoir une importance capitale.

Départ et arrivée

Ne partez pas à l’aventure. Avant de partir, identifiez précisément votre point d’entrée sur la rivière, et le point de sortie. Dans les rivières encaissées et dans les gorges, certains lieux sont parfois accessibles par un sentier. Hors sentier, veillez à avoir fait une reconnaissance de ces deux accès au préalable.

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Tenir l’horaire

En montagne, « tenir l’horaire » consiste à minuter (même sommairement) le déroulé de votre journée. A quelle heure entrez-vous dans la rivière ? A quelle heure envisagez-vous de sortir ? Quelle est la distance à parcourir ? Quelle distance êtes-vous capable de parcourir en une heure, en trois, en cinq ? En action de pêche, il est assez naturel de ne pas (avoir envie de) regarder sa montre. Mais il en va, en rivière sauvage, de votre sécurité. Il est toujours préférable de pêcher trop vite, que de pêcher trop tard. Veillez à « tenir l’horaire » de votre journée. Si, à la mi-journée, vous constatez que vous n’êtes toujours pas à la moitié du parcours, alors faites immédiatement demi-tour. Dans le cas contraire, vous n’aurez pas atteint la sortie en fin de journée. La bonne connaissance du parcours et du temps nécessaire à le traverser vous permettra de mieux appréhender les sorties suivantes. Procédez par ordre, et prenez le temps d’estimer le temps de parcours de vos linéaires avec précision.

Attention à l’accident stupide

Une chute, un tronc glissant, une pierre qui roule sous les pieds… Il y a mille et une manières de chuter et de se blesser en action de pêche. En temps normal, la situation n’est pas agréable. Une fois engagé dans les gorges d’une rivière sauvage, une blessure même moyennement grave (type entorse) devient rapidement une situation d’urgence. N’évoquons même pas celle d’une fracture… En milieu à risque, augmentez votre marge de sécurité. Et méfiez-vous de tout excès de confiance. Gardez à l’esprit que vous n’avez aucun joker.

Escalader les embâcles lors d'une pêche en rivière sauvage ? Attention danger !
Escalader les embâcles lors d’une pêche en rivière sauvage ? Attention danger !

Soyez prêt !

Appréhender des zones dangereuses à la pêche suppose d’être opérationnel en tout circonstance. Cela signifie, par exemple, d’avoir la condition physique adaptée à la sortie. La fin de saison, avec les rivières à l’étiage, se prête parfaitement aux sorties les plus techniques. Veillez également à être capable d’utiliser le matériel que vous emportez. Avoir une corde dans le sac pour faire une réchappe, c’est bien. Savoir gérer un rappel correctement et en sécurité, c’est mieux. Être prêt, c’est également avoir en fond de sac le matériel d’urgence et de sécurité adapté à sa sortie.

Pêche en rivière sauvage

Pêche en rivière sauvage : quel équipement emporter ?

Avant de s’aventurer pour pratiquer la pêche en rivière sauvage, il est capital d’être équipé d’un matériel spécifique. Il en va de votre confort, mais également de votre sécurité.

Waders ou combinaison néoprène ?

Quelle est la tenue la plus adaptée à la pêche en rivière sauvage ? Waders ou combinaison néoprène ? Les deux comportent à la fois des avantanges et des inconvénients, que je rappelerai ici :

Pour ou contre les waders ?

Les waders désignent une « salopette de pêche », étanche, qui permet de descendre dans l’eau. On distingue plusieurs types :

  • Avec bottes intégrés ou avec chaussons néoprène
  • En PVC, en néoprène ou en tissu membrané

Les waders avec chaussons sont préférables aux modèles équipés de bottes intégrés. Il est en effet préférable de pouvoir choisir ses chaussures. Les waders à bottes intégrées sont généralement dévolus aux modèles d’entrée de gamme, et la qualité de la semelle des bottes laisse souvent à désirer en termes d’accroche.

Les waters demeurent une valeur sûre pour la pêche en rivière sauvage.
Les waters demeurent une valeur sûre pour la pêche en rivière sauvage.

A contrario, les waders ne possèdent pas que des avantages. Certes, ils permettent de descendre dans l’eau sans se mouiller. Mais passé un mètre de hauteur d’eau, le risque d’entrée d’eau au niveau de la poitrine devient non négligeable. Et au-delà de l’inconfort, cela devient un problème de sécurité. Des waders remplis d’eau deviennent, sur la terre ferme, très lourd. Par ailleurs, en cas de chute « tête en avant », des waders sont susceptibles de provoquer un effet « bouée » au niveau des jambes. Une impossibilité de se retourner présente donc un risque de noyade. Pour éviter toute situation dangereuse, on veillera à évacuer au maximum l’air présent au niveau des jambes, sous la ceinture.

Pour ou contre la combinaison néoprène ?

Une combinaison néoprène (de 4 à 5 mm) est recommandée en cas d’immersions régulières et/ou prolongées en eau très froide. Dans les gorges très aquatiques, elle s’avère l’équipement idéal. Pour autant, elle n’est pas exempte de défauts. Elle ne présente pas exemple aucune poche, et devra donc être complétée par un gilet de pêche. Elle est également sensible aux accroches avec les hameçons. Mais son inconvénient majeur est son inconfort « hors de l’eau ». Marcher sur de longues distances ou une journée complète avec une combinaison néoprène, qui plus est sous de fortes chaleurs, est quasiment rédhibitoire.

Bottes, chaussures de wading ou de canyoning ?

Comme évoqué plus haut, les bottes devront être choisies avec un crantage sérieux. Des waders à bottes intégrées vous permettront de descendre dans l’eau, mais attendez-vous à des glissades intempestives. Même remarque avec des cuissardes, sauf à opter pour des modèles sérieux. Autant de remarques qui leur font préférer, pour nombre de pêcheurs, les chaussures de wading.

Choisir une chaussure de wading

Spécialement étudiées pour la pêche, les chaussures de wading sont de deux types :

  • Les modèles à semelle de feutre, très efficaces en termes d’accroche mais d’une durée de vie faible à moyenne,
  • Les modèles à semelle type Vibram, moyennement efficaces en accroche, mais d’une durée de vie plus longue.

En rivière de montagne, les chaussures à semelle dures sont à privilégier, compte tenu de la difficulté du terrain.

Que penser des chaussures de  canyoning ?

Autre types de chaussures disponibles, les chaussures de randonnée et les chaussures de canyoning. Evitez les premières, qui ne sont pas conçues pour des immersions récurrentes. Leur comportement sera parfait au début, mais le vieillissement prématuré des colles et des tissus ou du cuir réduira très rapidement leur durée de vie.
Les chaussures de canyoning sont parfaitement adaptées pour la pêche en rivière sauvage. Conçues pour être résistantes à l’eau (colle, coutures, matière), elles offrent également de bonne performances en termes d’accroche. Les principaux modèles de chaussures de canyoning prisés par les pratiquants sont les Adidas Terrex Hydro Lace et les Bestard Canyon Guide. A noter que les Five Ten Canyoneer, longtemps référence dans le domaine, ne sont plus produite depuis le rachat de la marque par Adidas.

Lors d'une pêche en rivière sauvage, les risques de glissade seront atténués par une chaussure de canyoning.
Lors d’une pêche en rivière sauvage, les risques de glissade seront atténués par une chaussure de canyoning.

Cordes et harnais ?

Certaines pratiques en gorges très encaissées nécessitent un équipement complémentaire de type canyon. Dans la panoplie du canyoniste, nous citerons la corde statique (≠corde d’escalade ou polypropylène), le harnais, les mousquetons et descendeurs ou encore les poignées jumar ou croll. L’utilisation de ces matériels nécessite une réelle compétence et une expérience en canyoning et/ou spéléologie pour une pratique en toute sécurité. Réservé aux experts uniquement.

Emporter un tracker GPS ?

L’usage d’une balise GPS est conseillée pour les pratiquants pêchant seul (ce qui est déconseillé, malgré tout). Le souci rencontrés par ces balises GPS sont de plusieurs ordre. D’une part, elles ont tendance à se décharger rapidement (généralement moins d’une journée en usage GPS permanent). D’autre part, elles nécessitent une connexion téléphonique (3G, 4G) et donc du réseau téléphonique pour transmettre leur position à intervalle régulier.

Heureusement, depuis quelques années, des balises LPWAN (Low Power Wide Area Network, réseau étendu à basse consommation) ont fait leur apparition sur la marché. Destinée à « l’internet des objet »,cette technologie se nomme également LoRa. Elle caractérise par des transmissions à longue portée, à faible consommation et à faible coût. Plusieurs fabricants proposent des balises, associées à des abonnements à faible coût (10 € par an environ).

Tracker GPS LoRa proposé par Invoxia

Exemple de tracker GPS

À titre d’exemple, j’ai en permanence dans mon gilet de pêche un tracker GPS de marque Invoxia, qui transmet ma position à une application consultable à distance par une personne qui en aurait les identifiants. La durée de vie de la batterie de cette balise est de quatre à six mois, et elle ne s’active qu’en cas de déplacement (via un accéléromètre intégré). Elle est associée à un abonnement LoRa à 9,90 € par an (trois premières années gratuites).

Des abonnements LoRa sont proposés par Orange et Bouygues Télécom sur un réseau indépendant de celui des antennes 3G-4G de téléphonie mobile.
Voir le détail de la couverture de ces opérateurs :

Ce type de balise LoRa n’est pas parfait. En situation, dans les vallées encaissées de ma région, les données GPS sont parfois imprécises et la transmission des données peu fréquentes. Malgré tout, sans pour autant me localiser avec une précision exacte, les données disponibles sauront renseigner efficacement les éventuels secours sur ma position approximative, et leur (me) faire gagner plusieurs heures. Elle s’avère donc, pour moi, et malgré ses imperfections, un véritable outil de sécurité, simple à gérer. En permanence dans mon gilet, je n’ai qu’à le recharger une fois tous les quatre à six mois (lorsque je reçois une notification de batterie faible).

Trousse à pharmacie

En milieu à risque, il est conseillé d’emporter en fond de sac une trousse de premier secours. Cette dernière comprendra a minima des compresses, pansements, liquide antiseptique et éventuellement un pansement de compression.

Quelle est la meilleure technique pêche en rivière sauvage ?

Plusieurs techniques sont envisageables pour pratique la pêche en rivière sauvage. Certaines sont plus efficaces que d’autres. Par ordre d’efficacité, nous citerons :

La pêche au toc aux appâts naturels

La pêche au toc aux appâts naturels (ver de terre, teigne…) est probablement la technique la plus efficace pour la pêche en rivière sauvage. Les gorges et les éboulis composent de nombreuses caches pour les truites, que l’on pourra pêcher très efficacement en dérive naturelle. Ne manquez pas les nombreux articles consacrés à la pêche au toc aux appâts naturels sur le site.

Pêche à la cuillère

Parfois compliquée dans les petits espaces, la pêche à la cuillère devient très efficace sur les postes un peu plus larges ou longs. La cuillère offre l’avantage de cibler des poissons plus gros qu’au toc. Un bémol, toutefois, sur les postes encombrés (branches, troncs immergés…), le risque d’accrocher et de perdre sa cuillère devient important. C’est d’ailleurs le principal frein à la pêche aux leurres en rivière sauvage. 

Pêche en nymphe

S »il est possible de pêcher au toc avec des nymphes, le pêche évoquée ici concerne plutôt la nymphe au fil, pratiquée avec une canne à mouche. La nymphe au fil est une technique efficace pour la pêche en rivière sauvage. Son intérêt est d’explorer les zones profondes, où évolue le poisson une grande partie de la journée. Elle s’avère également excellente sur les zones de radiers, de faible profondeur avec des courants vigoureux. En matinée, avant le réchauffement et les éclosions, c’est une excellente technique avant de basculer en sèche.

Pêche à la mouche sèche

La pêche à la mouche, plus particulièrement en sèche, n’est guère à son aise dans les rivières encaissées. Mais les sorties de courants, sur les postes présentant de grosses vasques, sont de bons secteurs à pêcher en sèche. Les bordures et les contre-courants donnent également de bons résultats. Les gros poissons se tenant souvent en profondeur, au meilleur endroit du poste, par sélection naturelle, ils seront souvent plus difficiles à attraper à la mouche sèche. Mais le plaisir, lui, demeurera intact !

Si vous avez un avis, un commentaire, une question, n’hésitez pas à m’en faire part. Les expériences sont faites pour être partagées !